"Un tiens vaut mieux que... zéro tiens, hé hé"

Mais où garder le butin de plumes récolté ?

Dans la basse-cour au milieu de ces poules bornées, qui passaient leur temps à se plaindre en caquetant ? Mais c’est qu’elles auraient été capables de demander des augmentations de grain, les niaises, si enclines à pondre moins et manger plus. Ah non.

Dans la paille, sous les oeufs ?

Pour que les fermiers avides viennent ponctionner leur dîme ? Encore moins.

Un vieil aigle majestueux se dressa alors. "J’ai tout là-haut dans les montagnes une ancienne aire, totalement inaccessible et inviolable. Le trésor y dormira à l’abri, et cela te laissera le temps ami dindon, de convaincre les fermiers de commencer â surélever notre volière sans se douter de rien. Ils n’ont pas besoin de savoir."

 "Et je règnerai sur la plus riche basse-cour du monde", glouglouta intérieurement le faisan et lorgnant benoîtement sur les plumes d'une grosse pintade.

Ainsi fut fait.

Si le coq vénérait l’autorité, le faisan, lui, vénérait les plumes et l’apparat. Il advint qu’il réunit les plus somptueux oiseaux de la collectivité au sommet du plus bel arbre de la colline.

- Ne voudriez-vous pas élever vos poussins dans une volière qui vous ressemble, une volière à votre image ? Claironnante, bigarrée, rutilante, comme vous ?

Les vaniteux qui n’avaient pas tous lu La Fontaine se sentirent flattés, ils se rengorgèrent un peu avant de rivaliser de générosité, pour le bien de la poulaille s’entend.

Et cela tombait bien, car nombre d’entre eux étaient à ce point alourdis par leurs parure qu’un petit allègement discret les arrangeait bien, aussi, non seulement donnèrent-ils de grand coeur, mais ils furent très reconnaissant au faisan de leur offrir cette possibilité de placement.